jeudi 2 avril 2015

L'Instant Kiwi: les journaux


Je te l’avais déjà dit, les journaux Kiwis sont assez fun.

Pas foncièrement fun dans leur langage ou leurs articles (ça c’est plutôt pour les pubs, j’en reparlerai une autre fois) mais surtout dans leur conception de ce qui constitue des nouvelles.

On va le rappeler parce que ça ne fait pas de mal, mais on a affaire à un pays qui compte 4 millions et demi d’habitants. Soit très exactement la population de la Bretagne, répartie sur une aire un poil plus grande que le Royaume-Uni.

(Et quand je dis « exactement », c’est « au Breton près » : 4,471 millions contre 4,475).

(Donc en fait y’a techniquement plus de gens en Bretagne que dans toute la Nouvelle-Zélande.)

(Un chiffre à méditer.)

Ajoute à ça qu’on vit dans un pays du Premier Monde, et qui plus est un pays de gros Bisounours, et donc tu comprendras qu’en matière de nouvelles, on traite n’importe quelle info comme un truc très croustillant.

Rien de bien choquant, me diras-tu.

Ouais, sauf que ça atteint des sommets assez inimaginables en termes de traitement des sujets.

Car le journaliste Kiwi, semble-t-il, ne se pose jamais la question de « Est-ce que ça mérite un article d’une page entière ? ».

(Ou alors il se la pose, et la réponse est toujours « OUAIS CARRÉMENT ET MÊME DEUX PAGES PEUT-ETRE !! »)

Du moins, c’est la seule explication que j’aie trouvée en voyant les gros titres du journal local de cette semaine :



Bon, j'ai vu le titre, et je me suis dit "Okay, donc il a dû y avoir un prisonnier qui s'est échappé de Mount Eden et vient d'être recapturé", mais ça me semblait un peu incroyable qu'un gars s'échappe de prison à Auckland et que j'en entende parler que maintenant.

Et j'avais raison de me méfier, parce que voici la photo qui accompagnait l'article:


(Swag)

Non, c'est pas une blague, le journal a vraiment fait sa une sur un perroquet qui s'était échappé de sa cage et qui a été retrouvé.



(Ah mais quand je dis qu'il se passe pas grand-chose dans ce pays, c'est pas de la blague, hein.)

L'article conte donc l'aventure fabuleuse de Cherie, une perruche qui s'était échappée du jardin de ses vieux (car oui, en Nouvelle-Zélande comme en France, avoir des perruches est vraiment un truc de vieux). Les deux petits vieux ont donc passé des jours à la chercher éperdument, mais Cherie a finalement été retrouvée par une classe de CM2, a plus de six kilomètres de sa maison.

Alors pardon mais je trouve que c'est un peu pourri pour un oiseau de mettre des semaines à faire six kilomètres. Même moi avec mes jambes molles je peux facilement faire six kilomètres en moins d'une journée, et Cherie c'est pas pour enfoncer le couteau mais T'AS DES AILES!

Mais bon, mon passage préféré de l'article reste quand même l'histoire de George, le compagnon de Cherie, puisque sache-le, les perroquets se mettent en couple pour la vie (comme les Catholiques).

Eh ben George, d'après ses vieux gâteux, était "traumatisé" en apprenant la disparition de Cherie. Sauf qu'on dirait qu'il a pas mis trop de temps à se remettre, puisqu'au retour de sa dulcinée, il était pas ravi-ravi:


Quelque chose me dit que George n'était pas si "inconsolable" que ça au final.


(George, tu te sens bien?)

Bon, du coup je sais pas toi, mais perso je suis bien déprimée par cette histoire. Genre on entend partout des anecdotes sur les perroquets inséparables qui meurent en même temps et tout, et là carrément pas, Cherie fait ses bagages et George fait la fête, et quand elle revient il lui fait la gueule.

(Paye ton amour éternel quoi.)

Bref, des nouvelles passionnantes, comme tu peux le voir.

Et bon, je te vois venir.

Tu vas me dire « Attends Charlotte t’es de mauvaise foi, tout le monde sait que les journaux locaux traitent les informations les plus ridiculement minuscules, si t’épluches l’Alsace tu trouves les mêmes histoires. »

Et bon, soit, pour un journal régional, ça peut sembler normal.

Mais alors va quand même falloir qu’on m’explique que le New Zealand Herald, le journal NATIONAL, titre ses éditions avec des nouvelles de ce genre :



Son lapin en PELUCHE.


(Parfaitement.)

Donc c’est six paragraphes sur l’histoire de la gamine qui a perdu son doudou, et la maman qui a fait tourner une petite annonce sur le net pour le retrouver, et puis une dame l’a retrouvé, et c’est la fin.

(Tant de palpitations, c’est inouï.)

En gros, le truc le plus informatif dans l'article, c'est que j'ai appris que Darcey pouvait être un nom féminin (et pas juste un nom méga moche).

J’adore quand même comme la journaliste te glisse des morceaux de suspense dans l’article, genre à un moment la maman va chercher le doudou égaré, mais en fait on sait pas trop si c’est bien lui (alors qu’en fait si, on sait vu que c’est dans le titre) (chuuut) et puis elle donne le doudou à sa fille pour inspection et après moult et moult dubitations, il s’avère que c’est bien lui.



(Tu peux te remettre à respirer.)

Alors je sais pas toi, mais perso je sens l’arnaque à plein nez, parce que la gamine a trois ans et demi, et au cas où tu connais pas trop d’enfants de trois ans et demi, laisse-moi t’expliquer : c’est pas les ampoules les plus brillantes du lustre, si tu saisis c’que j’veux dire.

(C’est des teu-bé.)

Donc je flaire quand même le coup des parents qui filent un vieux doudou de la Croix Rouge en loucedé à la gamine en lui disant :

- Oh regarde, Bunny est revenu ! Oui, il est beige au lieu de gris maintenant, mais c’est… parce qu’il a vécu plein d’aventures !

Parce que ce genre de conneries, les mômes, ils les gobent toutes crues.

Saluons au passage l’information CAPITALE de fin d’article qui nous indique que Bunny va devoir passer à la machine, mais il faudra le faire en secret, parce que la petite fille ne veut pas qu’on lave son doudou.

(Je te lui mettrais une tarte derrière l’oreille, à cette petite crado, ce serait vite vu.)

Bref, un nouveau jour glorieux au pays des nouvelles cruciales.

Bientôt, on parlera du référendum sur le drapeau, tu vas voir ça va être grandiose en termes de nouvelles cruciales.

A plus dans le bus!

1 commentaire:

  1. "c’est pas les ampoules les plus brillantes du lustre, si tu saisis c’que j’veux dire."
    Je déclare solennellement cette phrase la phrase la plus marrante du mois (et on est que le 2!). J'aurais bien dit de l'année mais je vais quand même laisser une chance à la concurrence.

    Mais sinon, ça me fait penser au Tumblr "à juste titre" : http://ajustetitre.tumblr.com/ L'histoire de Cherie et George y aurait eu une place de choix haha !

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